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Abbé Moreux

La vie sur Mars (1924)


On n'a pas tenu compte de ces conditions, qu'on soupçonnait à peine autrefois, lorsqu'on a bâti la plupart des observatoires français, qu'une loi organique a liés à nos Facultés, et c'est grand dommage. Peu d'observatoires en France sont placés dans les conditions requises pour faire de l'astronomie planétaire.

En fait, le calme des images ne se rencontre qu'au-dessus des plaines ou des hauts plateaux.

J'ai entendu souvent médire de l'Observatoire de Paris, et il a été plusieurs fois question de lui chercher un autre emplacement ; eh bien, n'en déplaise aux auteurs du projet, peu d'endroits sont aussi favorables que Paris pour les observations d'astronomie physique. L'atmosphère très dense, parfois brumeuse de la capitale vaut cent fois mieux que celle des environs, dont la topographie tourmentée et pittoresque crée des courants de convection fort gênants pour les observateurs.

[17] Au foyer de nos grandes lunettes, les planètes sont tellement lumineuses que la diminution de clarté résultant d'un fort grossissement, n'est jamais un obstacle à l'observation, mais, je le répète à dessein, si l'emplacement de l'observatoire n'a pas été spécialement choisi, l'utilisation du pouvoir amplificateur maximum de la lunette demeure quasi impossible.

Il y a un moyen, pensera-t-on  : c'est de diaphragmer l'objectif. Dès ce moment, en effet, les images deviennent plus nettes, mais c'est au détriment des détails visibles. On démontre en effet, en Optique, que le pouvoir séparateur d'un objectif, c'est-à-dire celui de distinguer de fins linéaments situés l'un près de l'autre, dépend du diamètre de la lentille. Il résulte de ce fait qu'avec un objectif donné, on ne peut pas augmenter indéfiniment le grossissement ; et qu'enfin ce dernier diminue très vite à mesure qu'on restreint volontairement l'ouverture de l'instrument.

Un objectif de 1 mètre de diamètre peut comporter des grossissements de 2000 fois environ, pour les planètes ; or, en raison du trouble des images, il est extrêmement rare qu'on puisse employer un pouvoir dépassant 600 fois. Dans les conditions même les plus favorables, la vision télescopique n'est pas aussi aisée qu'on pourrait le croire et ce que je vais dire s'applique également aux études micrographiques.

[18] Pour apercevoir des détails souvent à la limite de visibilité, il faut un oeil très expérimenté et j'estime -- pour avoir fait cet apprentissage -- qu'on ne commence vraiment à bien voir, dans une lunette ou un télescope, qu'après une quinzaine d'années d'entraînement.

Notez qu'on peut faire de l'astronomie sans cela  : on peut photographier le ciel, user du spectroscope, calculer des étoiles doubles, aligner des équations sans posséder un oeil entraîné ; et c'est ce que font bon nombre d'astronomes ; mais celui qui désire observer les planètes, doit perfectionner son acuité visuelle et apprendre à voir les détails.

Cette particularité m'avait toujours paru étrange au point de vue physiologique, et je m'expliquais mal ce qui pouvait se passer en la circonstance. Je m'en suis ouvert bien des fois à des ophtalmologistes éminents, mais ce n'est que tout récemment que j'eus la clef du mystère.

Pour que deux lignes parallèles soient distinguées l'une de l'autre, elles doivent former sur la rétine deux images distantes de 4 microns [NOTE Le micron vaut un millième de millimètre.], grandeur égale au diamètre des bâtonnets, c'est-à-dire des éléments fonctionnellement indivisibles de la rétine  : semblable distance correspond à un angle de 1 minute ou 60 secondes.

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Texte produit par Pierre Cubaud (cubaud@cnam.fr)